Endométriose : une étiquette qui colle à la peau
Depuis mes premières règles à 12 ans, j’ai toujours ressenti une certaine appréhension vis-à-vis de mon ventre, car à tout moment il pouvait me compliquer la vie. Mes règles s’accompagnaient toujours de douleurs, allant de « simples » crampes à des gènes suffisamment intenses pour m’empêcher de marcher. Malgré tout, les gynécologues, médecins et urgentistes répétaient tous en chœur « c’est normal que des règles soient douloureuses, prenez un antalgique et attendez que ça passe ». Alors j’attendais que le traitement fasse effet, j’attendais le soulagement parfois en serrant les dents pour que mon ventre me laisse tranquille.
Les années sont passées et peu à peu ces douleurs se sont étendues hors de ma période de règles, affectant mon quotidien de manière imprévisible. Je ne comptais plus le nombre de sorties entre amis ou de relations intimes, gâchées par des douleurs, toujours là en arrière-plan.
Même dans les moments où il est crucial de faire bonne figure, comme les entretiens professionnels, je n’étais jamais à l’abri d’une attaque soudaine de mon ventre, accompagnée de troubles intestinaux, me forçant parfois à courir aux toilettes.
« C’est normal que des règles soient douloureuses, prenez un antalgique et attendez que ça passe »
C’est à 25 ans, après avoir changé de ville et de gynécologue que j’ai enfin pu mettre une étiquette sur ma souffrance : l’endométriose. Plus à l’écoute et empathique vis-à-vis de mon parcours, elle m’a tout de suite proposé une échographie lorsque je lui ai expliqué ressentir fréquemment des décharges électriques dans l’utérus lors de mes règles. Quelques semaines plus tard, après une série d’examens (IRM, prises de sang et consultations de spécialistes), le verdict était sans appel : endométriose sévère s’étendant aux ovaires, au colon et à la vessie. Toutes ces années sans diagnostic avaient permis à la maladie d’emménager partout dans mon ventre.
Refusant de continuer à l’héberger, j’ai pris la décision de me faire opérer. Après 8 mois et 2 opérations, les douleurs se sont enfin atténuées ! Elles étaient encore légèrement présentes pendant les règles et les rapports, mais j’ai pu commencer à reprendre le contrôle de ma vie.
Il m’a fallu réapprendre à vivre avec ce ventre qui m’avait tant fait souffrir.
J’ai appris à écouter mon corps, à mieux le connaître pour anticiper les moments difficiles. Je médite chaque matin pour me recentrer et je tiens un journal de mes ressentis de la journée le soir. La natation, la marche, la danse sont devenues des alliées pour me reconnecter à mon corps positivement, tout comme la cohérence cardiaque, une technique de respiration qui m’aide à gérer mon stress et mon ventre.
J’ai aussi repris le contrôle de mon alimentation. Fini de céder systématiquement à la “comfort food” à chaque douleur. J’ai exploré différents régimes et compléments alimentaires pour identifier ceux qui m’aidaient réellement à mieux vivre mes règles. Comprendre que certains aliments peuvent exacerber l’inflammation de l’endométriose a été un véritable déclic. Prendre soin de mon alimentation est devenu une façon d’apporter du confort et de l’amour à mon ventre et ainsi d’apaiser notre relation.
Il m’a fallu réapprendre à vivre avec ce ventre qui m’avait tant fait souffrir, ne plus le considérer uniquement comme un ennemi.
Cette période a été une véritable renaissance, un apprentissage pour l’adolescente en moi qui n’avait connu que frustration et colère contre son propre corps. M’autoriser des pauses quand j’étais fatiguée, savoir jusqu’où je pouvais me pousser sans m’épuiser et surtout parler de mon état sans tabou, m’a permis de me réconcilier avec moi-même.
Ces changements sont les plus visibles dans ma vision du couple et de l’intimité. Aujourd’hui, il n’est plus question d’accepter que mon partenaire minimise ma douleur lors d’un rapport, comme cela a pu être le cas par le passé. Avec mon compagnon, j’ai été honnête dès le début : notre intimité ne sera pas toujours « simple ». Cette franchise réciproque est essentielle pour dédramatiser les moments difficiles et ne pas laisser l’inquiétude envahir notre relation. L’endométriose est une maladie de couple et je suis reconnaissante que mon compagnon soit compréhensif lorsque mon corps me demande de faire une pause. Mais j’apprécie aussi qu’il me pousse à sortir, à voyager et vivre car le bonheur de ces moments partagés compensent souvent les douleurs causées par la maladie.
L’endométriose fait partie de ma vie, mais je refuse d’être définie par cette seule étiquette.
L’endométriose est une maladie qui nécessite un diagnostic et une prise en charge médicale, si vous pensez souffrir de ces symptômes consultez votre médecin ou gynécologue.
Références :
- Enquête sur le parcours de femmes souffrant d’endométriose : https://endofrance.org/wp-content/uploads/2020/06/resultat-enquete.pdf
- Témoignage de femmes souffrant d’endométriose : https://www.frm.org/fr/actualites/temoignages-patientes – https://www.elle.fr/Societe/News/Endometriose-vos-temoignages-entre-stupeur-et-douleur-3050680
- Auto-test endométriose : https://arnaudfauconnier.shinyapps.io/shinyDEVA/